Une jeune fille de 15 ans d’origine syrienne et ayant immigré de Turquie 3 mois plus tôt, jusqu’alors en santé, s’est présentée au service des urgences avec une enflure cervicale, une perte de poids et une fièvre sporadique apparues 6 mois auparavant, une toux apparue 1 mois auparavant et des sueurs nocturnes d’apparition soudaine.
À l’examen, la patiente semblait bien portante (50e percentile de l’indice de masse corporelle), avec une lymphadénopathie cervicale bilatérale (figure 1) sans autre atteinte des nœuds lymphatiques. La radiographie pulmonaire a révélé des opacités interstitielles et respiratoires bilatérales disséminées, des nodules et un granulome calcifié dans le lobe supérieur droit. Une tomodensitométrie avec agent de contraste intraveineux de son cou a révélé une lymphadénopathie nécrotique (figure 2). L’expectoration s’est avérée positive à la présence de bacilles acido-résistants, et le test PCR (réaction en chaîne par polymérase) a identifié le complexe Mycobacterium tuberculosis.
Nous avons prescrit de la rifampicine, de l’isoniazide, du pyrazinamide et de l’éthambutol pour suspicion d’infection disséminée à M. tuberculosis. En raison de l’aggravation de la lymphadénopathie malgré 1 mois de traitement, la patiente a subi une dissection du cou et une lymphadénectomie. La biopsie tissulaire a confirmé la présence de bacilles acido-résistants, avec inflammation granulomateuse visible au microscope. Les cultures d’expectoration et de selles ont révélé la présence d’un organisme résistant au pyrazinamide et sensible à la rifampicine, à l’isoniazide et à l’éthambutol, plus tard identifié comme la sous-espèce bovis de Mycobacterium bovis. La poursuite de l’anamnèse a révélé que la patiente avait consommé régulièrement du lait non pasteurisé en Turquie.
La patiente poursuit la prise de rifampicine et d’isoniazide; sa lymphadénopathie se guérit peu à peu. Les contacts familiaux ont obtenu un résultat négatif au test de dépistage de la tuberculose par libération de l’interféron γ, plutôt que par le test cutané à la tuberculine, en raison de leurs antécédents d’immunisation par le vaccin Bacille Calmette–Guérin.
M. bovis fait partie du complexe M. tuberculosis; elle cause une infection appelée « tuberculose bovine »1. Cette dernière se transmet généralement par l’ingestion de lait et de fromage à pâte molle non pasteurisés1,2. Son fardeau mondial a énormément diminué grâce à la pasteurisation du lait et à son dépistage chez les bovins, et elle a quasiment disparu au Canada2. La transmission par voie aérienne de personne à personne est rare.
Les manifestations extrapulmonaires, principalement des troubles gastro-intestinaux, découlent de l’acquisition majoritairement par voie orale de l’infection à M. bovis1. L’atteinte des nœuds lymphatiques cervicaux est fréquente.
Le complexe M. tuberculosis comprend 12 espèces; en Ontario, plus de 96 % des isolats sont M. tuberculosis3. M. bovis a une résistance intrinsèque au pyrazinamide, une indication diagnostique qui a entraîné des analyses spécialisées chez cette patiente2. Compte tenu de cette résistance, un traitement de 9 mois au minimum est suggéré; la récidive est possible4.
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Remerciements
Les auteurs remercient David Manson pour son assistance dans le choix, l’annotation et la rédaction de la légende des images de tomodensitométrie et de radiographie. Ils sont aussi reconnaissants à Melissa Greenblatt pour avoir détaillé le processus de dépistage du complexe Mycobacterium tuberculosis en santé publique.
Footnotes
Intérêts concurrents: Aucun déclaré.
Cet article a été révisé par des pairs.
Les auteurs ont obtenu le consentement de la patiente.
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