Abstract
Contexte: La surveillance régulière du cancer est essentielle pour comprendre où des progrès sont réalisés et où il faut en faire plus. Nous avons cherché à donner un aperçu du fardeau attendu du cancer au Canada, en 2022.
Méthodes: Nous avons obtenu les nouvelles données sur l’incidence du cancer à partir du Système national de déclaration des cas de cancer (1984–1991) et du Registre canadien du cancer (1992–2018). Les données sur la mortalité (1984–2019) sont extraites de la Base canadienne de données sur les décès de la Statistique de l’état civil. Nous avons projeté les nombres et les taux d’incidence du cancer et de mortalité jusqu’en 2022 pour 22 types de cancer, par sexe et par province ou territoire. Les taux ont été normalisés selon l’âge de la population type canadienne de 2011.
Résultats: On estime à 233 900 le nombre de nouveaux cas de cancer et à 85 100 le nombre de décès des suites du cancer au Canada en 2022. Nous nous attendons à ce que les cancers les plus fréquemment diagnostiqués soient le cancer du poumon en général (30 000), le cancer du sein chez les femmes (28 600) et le cancer de la prostate chez les hommes (24 600). De plus, le cancer du poumon devrait être la principale cause de décès lié au cancer, représentant 24,3 % de l’ensemble des décès par cancer, suivi des cancers colorectal (11,0 %), du pancréas (6,7 %) et du sein (6,5 %). On s’attend généralement à ce que les taux d’incidence et de mortalité soient plus élevés dans les provinces de l’est du Canada que dans celles de l’ouest.
Interprétation: Bien que les taux globaux de cancer soient en baisse, le nombre de cas et de décès continue de grimper, en raison de la croissance démographique et du vieillissement démographique. Le fardeau élevé projeté du cancer du poumon indique qu’il est nécessaire de renforcer la lutte contre le tabagisme et d’améliorer la détection précoce et le traitement. Les progrès réalisés en matière de dépistage et de traitement du cancer du sein et du cancer colorectal expliquent probablement la diminution continue de leur fardeau. Les progrès limités en matière de détection précoce et de nouveaux traitements du cancer du pancréas expliquent pourquoi on s’attend à ce qu’il soit la troisième cause de décès par cancer au Canada.
Les conséquences du cancer sur la population et les systèmes de soins de santé canadiens sont considérables. Le cancer est la principale cause de décès au Canada1,2 et des estimations antérieures ont montré que 43 % de toutes les personnes au Canada devraient recevoir un diagnostic de cancer au cours de leur vie3. Compte tenu de la population vieillissante et croissante, le nombre de nouveaux cas de cancer et de décès au Canada augmente également4. En plus de ses conséquences sur la santé, le cancer est coûteux. Le fardeau économique des soins liés au cancer au Canada est passé de 2,9 milliards de dollars en 2005 à 7,5 milliards de dollars en 2012, par année5.
Compte tenu des conséquences considérables du cancer sur la santé et l’économie au Canada, il est nécessaire de disposer de renseignements de surveillance complets et fiables pour déterminer les domaines dans lesquels des progrès ont été réalisés et ceux qui nécessitent davantage d’attention et de ressources. Pour répondre à ces besoins, le Comité consultatif des statistiques canadiennes sur le cancer, en collaboration avec la Société canadienne du cancer, Statistique Canada et l’Agence de la santé publique du Canada, produit les dernières statistiques de surveillance sur le cancer au Canada.
Les données sur le cancer sont souvent décalées de plusieurs années par rapport à la date actuelle, en raison du temps associé à leur collecte, à leur vérification et à leur analyse. Les taux d’incidence et de mortalité du cancer peuvent être projetés à court terme en extrapolant les tendances passées pour estimer les tendances futures, à l’aide de modèles statistiques. Ces projections à court terme fournissent une estimation plus à jour du paysage du cancer au Canada. Les nombres d’incidence et de mortalité, ainsi que les taux normalisés selon l’âge, donnent une image des conséquences du cancer au Canada, ce qui est essentiel pour la planification des ressources, la recherche et l’orientation des programmes de lutte contre le cancer.
La publication Statistiques canadiennes sur le cancer 20213 a fourni des estimations détaillées de l’incidence du cancer, de la mortalité et de la survie au Canada selon l’âge, le sexe, la région géographique et au fil du temps pour 22 types de cancer3. Nous présentons ici des estimations actualisées des nombres et des taux normalisés selon l’âge des nouveaux cas de cancer (incidence) et des décès par cancer (mortalité) prévus en 2022, selon le sexe et la province et le territoire, pour tous les âges confondus.
Méthodes
Sauf indication contraire, les méthodes et les sources de données utilisées dans cette étude sont décrites en détail dans la publication Statistiques canadiennes sur le cancer 20213, avec des années supplémentaires de données incluses dans les projections présentées précédemment.
Sources des données
Nous avons obtenu des données sur l’incidence du cancer de 1984 à 1991 du Système national de déclaration des cas de cancer, et des données de 1992 à 2018 du fichier maître des totalisations du Registre canadien du cancer6, publié le 19 mai 2021. Nous avons recueilli des données sur la mortalité de 1984 à 2019 à partir de la Base canadienne de données sur les décès de la Statistique de l’état civil, publiée le 26 novembre 20207. Ces bases de données nationales, fondées sur la population, sont hébergées par Statistique Canada et alimentées par les données transmises par les provinces et les territoires. Nous avons également obtenu de Statistique Canada des estimations de la population réelles et projetées8,9.
Analyse statistique
Pour obtenir les estimations de l’incidence et de la mortalité liées au cancer jusqu’en pour 2022, nous avons projeté le nombre de cas et les taux à l’aide du progiciel de projection CANPROJ10. CANPROJ utilise les tendances des données réelles (c.-à-d. historiques) pour sélectionner le modèle le mieux adapté pour les années suivantes, en fonction d’un algorithme de décision, à partir d’une série de 6 modèles fondés sur l’âge, la période et la cohorte. Les détails sur la sélection du modèle CANPROJ sont fournis à l’annexe 1, accessible au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.212097/tab-related-content.
Les données sur les cas de cancer diagnostiqués dans la province du Québec n’étaient pas disponibles à partir de 2011, car elles n’avaient pas encore été transmises au Registre canadien du cancer. Comme les données n’étaient disponibles que jusqu’en 2010 pour le Québec, nous avons estimé les cas et les taux d’incidence propres au Québec pour la période 2011–2022 en appliquant d’abord à la population québécoise les taux du Canada sans le Québec. Nous avons ensuite corrigé les taux du Québec en fonction du taux moyen pour le reste du pays multiplié par le ratio des estimations propres au sexe, à l’âge et au type de cancer au Québec par rapport au Canada (à l’exclusion du Québec) pour la période 2006–2010. Certains autres facteurs de correction ont été appliqués sur la base des nombres provisoires de 2011 pour les cancers traditionnellement sousdéclarés tels que le cancer de la prostate et le mélanome.
Nous avons produit des estimations prévisionnelles pour 22 types de cancer en fonction du sexe attribué à la naissance et de la région géographique (provinces et territoires). Les définitions des types de cancer figurent à l’annexe 1, tableau supplémentaire 1. Nous avons calculé les estimations pour l’ensemble du Canada en additionnant les projections pour chaque province et territoire. Tous les taux d’incidence et de mortalité ont été normalisés selon l’âge en fonction de la population type canadienne de 201111, à l’aide de la méthode directe.
Approbation éthique
Comme cette étude comportait l’analyse de données administratives accessibles au public des Centres de données de recherche (CDR) de Statistique Canada et ne demandait pas de communiquer avec des personnes, l’examen et l’approbation d’un comité d’examen éthique n’ont pas été nécessaires.
Résultats
Incidence en 2022
En 2022, on estime que 233 900 nouveaux cas de cancer seront diagnostiqués au Canada (tableau 1). Nous prévoyons que le cancer du poumon sera le cancer le plus fréquemment diagnostiqué au Canada, totalisant environ 30 000 nouveaux cas en 2022. Nous prévoyons que les cancers du sein (28 900 cas), de la prostate (24 600) et colorectal (24 300) seront les prochains cancers les plus fréquents. Les 107 800 nouveaux cas estimés de ces 4 types représentent 46 % de tous les cancers qui devraient être diagnostiqués au Canada en 2022.
Parmi les personnes assignées de sexe masculin à la naissance, nous prévoyons que le cancer de la prostate restera le cancer le plus fréquemment diagnostiqué, représentant environ 1 nouveau cancer sur 5, suivi des cancers du poumon (12 %), colorectal (11 %) et de la vessie (8 %). On s’attend à ce que les cancers les plus couramment diagnostiqués chez les personnes assignées de sexe féminin à la naissance soient le cancer du sein (25 %), du poumon (13 %), colorectal (10 %) et utérin (7 %).
Les taux d’incidence normalisés selon l’âge (TINA) (tableau 1) pour le Canada, à l’exclusion du Québec, montrent que le cancer est diagnostiqué à un taux plus élevé chez les hommes que chez les femmes pour tous les cancers non spécifiques aux femmes, à l’exception de la thyroïde et du sein. Le TINA pour tous les cancers combinés en 2022 est 15 % plus élevé chez les hommes que chez les femmes (555,4 par rapport à 483,3 pour 100 000). Nous prévoyons que le nombre total de nouveaux diagnostics de cancer sera 7 % plus élevé chez les hommes (121 100) que chez les femmes (112 800).
Mortalité en 2022
Nous prévoyons que 85 100 Canadiens mourront du cancer en 2022 (tableau 2). La première cause de décès par cancer devrait être le cancer du poumon, qui représente environ un quart de tous les décès par cancer (20 700) au Canada. Nous prévoyons que les causes de décès par cancer les plus fréquentes seront le cancer colorectal (9400) et les cancers du pancréas (5700), du sein (5500) et de la prostate (4600). Nous prévoyons que ces 5 principales causes de décès par cancer représenteront 54 % de tous les décès par cancer au Canada en 2022.
Chez les hommes comme chez les femmes, le cancer du poumon représente le nombre le plus élevé de décès par cancer (10 600 [24 %] et 10 100 [25 %] décès projetés, respectivement). Le cancer colorectal (5200 [12 %]), la prostate (4600 [10 %]) et le pancréas (3000 [7 %]) sont les causes suivantes de décès par cancer chez les hommes, tandis que chez les femmes, les principales causes suivantes de décès par cancer sont le sein (5500 [14 %]), le cancer colorectal (4200 [11 %]) et le pancréas (2800 [7 %]).
Le nombre de décès par cancer attendu en 2022 chez les hommes est supérieur de 13 % à celui des femmes. Toutefois, nous nous attendons à ce que le taux de mortalité normalisé selon l’âge (TMNA) soit nettement plus élevé (34 % de plus) chez les hommes que chez les femmes (TMNA = 212,3 par rapport à 158,5 pour 100 000, respectivement). En dehors du cancer du sein, nous nous attendons à ce que les hommes aient des taux de mortalité par cancer plus élevés pour tous les autres types de cancer non spécifiques aux femmes (tableau 2).
Incidence au fil du temps
La figure 1 illustre les tendances dans les TINA pour les cancers les plus courants chez les hommes et les femmes au Canada, entre 1984 et 2022. Le taux d’incidence du cancer du poumon chez les hommes a diminué de manière significative au cours de cette période et, selon les prévisions, le TINA en 2022 sera de 52 % ce qu’il était en 1984. Le taux d’incidence du cancer du poumon chez les femmes a augmenté de 1984 à environ 2014 avant de commencer à diminuer; toutefois, malgré cette baisse récente, nous prévoyons qu’en 2022, le TINA sera 43 % plus élevé que le taux de 1984. Le taux d’incidence du cancer colorectal chez les hommes et les femmes a diminué depuis le début des années 2000; toutefois, la baisse s’est accélérée depuis 2013–2014 pour les deux sexes. Le taux d’incidence du cancer de la prostate a augmenté de façon spectaculaire chez les hommes au début des années 1990 et a connu plusieurs vagues d’augmentation et de diminution de l’incidence, mais les taux sont relativement stables depuis 2014 et nous nous attendons à ce qu’ils restent assez constants jusqu’en 2022. Le taux d’incidence du cancer du sein chez les femmes a augmenté jusqu’au milieu des années 1990 et a oscillé au cours des 2 dernières décennies.
Mortalité au fil du temps
La figure 2 montre les TMNA entre 1984 et 2022 pour les principales causes de décès par cancer chez les hommes et les femmes au Canada. Les taux de mortalité par cancer du poumon, de la prostate et colorectal ont constamment diminué au Canada au cours des 2 dernières décennies. Chez les femmes, les taux de mortalité par cancer du poumon ont augmenté à partir de 1984, mais les taux ont diminué depuis 2015. Les taux de mortalité par cancer colorectal et par cancer du sein chez les femmes ont tous deux diminué de manière constante au cours de cette période. Le taux de mortalité par cancer du pancréas chez les hommes a diminué de 1984 à 2000, après quoi les taux sont restés généralement stables; les TMNA pour le cancer du pancréas sont relativement stables chez les femmes depuis 1984.
Incidence et mortalité au Canada
L’annexe 2, tableaux supplémentaires 2–5, accessible au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.212097/tab-related-content) comprend les estimations de l’incidence et de la mortalité pour chaque province et territoire. Les estimations projetées pour les territoires sont présentées à l’annexe 3 (accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.212097/tab-related-content), mais n’ont pas pu être ventilées davantage par type de cancer en raison des petits nombres. L’annexe 3, figure supplémentaire 1A, montre la variation des TINA estimés pour 2022, par région, tous cancers confondus. Les taux d’incidence normalisés selon l’âge sont les plus bas dans l’ouest et plus élevés dans l’est du Canada. De même, les TMNA (annexe 3, figure supplémentaire 1B) sont plus faibles dans l’ouest et le centre du pays et généralement plus élevés dans l’est. Il convient de noter que les taux d’incidence ne sont pas disponibles pour le Québec dans cette analyse, car l’approche adoptée pour estimer l’incidence du cancer dans la province n’est pas comparable à celle des autres régions. Les TINA projetés et le nombre de nouveaux cas de cancer pour 2022 sont fournis par type de cancer et par région à l’annexe 2, tableaux S2 et S3, respectivement, et les TMNA et les décès par cancer en 2022 sont fournis à l’annexe 2, tableaux S4 et S5, respectivement.
Interprétation
Les efforts de lutte contre le cancer ont un effet sur le fardeau du cancer au Canada. Les TINA et TMNA globaux continuent de baisser, en grande partie, selon nous, grâce aux efforts et aux investissements continus dans la prévention, le dépistage, la détection précoce et le traitement du cancer. En outre, les personnes au Canada qui ont reçu un diagnostic de cancer ont vu leur taux de survie global augmenter12. Cependant, le cancer continue de représenter un fardeau croissant pour le système de santé canadien, car nous prévoyons que l’augmentation annuelle du nombre total de nouveaux cancers primaires se poursuivra jusqu’en 2022, en grande partie en raison de la croissance et du vieillissement démographique. Bien que les résultats du cancer dans la population au Canada s’améliorent généralement, les données individuelles nécessaires pour comparer les différences au sein des sous-groupes de la population et entre eux (comme les personnes de statut socioéconomique, de race ou d’ethnie différents) sont actuellement limitées ou absentes des registres. Les données des territoires de recensement suggèrent toutefois que des disparités en matière d’incidence et de mortalité existent entre les groupes socioéconomiques et démographiques au Canada13,14. Des efforts et des investissements sont en cours pour élaborer une stratégie pancanadienne de données afin de mieux comprendre la lutte contre le cancer et ses résultats, avec une plus grande granularité entre les groupes de population3.
Nos estimations mettent en évidence les domaines dans lesquels il faut déployer plus d’efforts. En matière de prévention primaire, étant donné l’augmentation constante de l’incidence du cancer du poumon chez les femmes avant les récentes baisses, des mesures ciblées visant à réduire la consommation de tabac chez les populations plus jeunes et chez les femmes restent nécessaires15. En outre, les taux de tabagisme sont plus élevés au sein de plusieurs populations, comme les personnes à faible revenu, celles qui vivent en milieu rural et les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis16. L’augmentation des taux d’incidence du mélanome suggère qu’il est nécessaire de poursuivre les efforts pour réduire l’exposition aux ultraviolets et accroître la prudence au soleil17. Les tendances de l’incidence du cancer de la prostate suivent un modèle inhabituel qui peut être attribué à des changements historiques dans les pratiques de dépistage dans la population. Le dépistage de l’antigène prostatique spécifique (APS) a été rapidement introduit dans la pratique, ce qui a entraîné les pics d’incidence du cancer de la prostate dans les années 1990 et au début des années 20003. Après avoir découvert qu’un grand nombre de cancers de la prostate non agressifs étaient surdiagnostiqués, l’APS n’est plus recommandé comme principale modalité de dépistage au Canada, mais comme un élément d’une surveillance de la santé plus large liée au cancer de la prostate18.
Les cancers à incidence moyenne, comme ceux de la vessie, de la tête et du cou, le mélanome, le cancer du rein et du bassinet, ainsi que le lymphome non hodgkinien, ont un effet considérable sur le fardeau global du cancer au Canada. Compte tenu de cet effet sur les patients, des recherches actives sont menées sur la prévention, les programmes de dépistage potentiels et les nouvelles thérapies pour ces cancers19.
Les programmes de dépistage organisés ont eu un effet sur la réduction de l’incidence du cancer au Canada. Les efforts fructueux en matière de dépistage du cancer du sein, du cancer colorectal et du cancer du col de l’utérus expliquent probablement le déclin continu de leur effet relatif. Il faut déployer plus d’efforts pour maximiser l’adoption et l’adhésion de tous les segments de la population canadienne par le biais de pratiques adaptées sur le plan culturel. Dans la plupart des provinces et des territoires, les taux de dépistage sont bien en deçà des niveaux recommandés, et souvent les taux sont considérablement plus faibles parmi les populations historiquement sous-dépistées (minorités visibles, immigrants, personnes appartenant aux groupes socioéconomiques inférieurs, et Premières Nations, Inuits et Métis)20,21. Récemment, plusieurs provinces ont lancé des programmes organisés de dépistage du cancer du poumon pour les personnes à haut risque de développer un cancer du poumon22,23, tandis que d’autres ont mis en œuvre des analyses de rentabilité, des projets pilotes et des études24.
Bien que la mortalité et la survie se soient considérablement améliorées au cours des 3 dernières décennies pour de nombreux types de cancer, pour d’autres, des recherches et des investissements supplémentaires dans de nouvelles approches de dépistage et de nouvelles thérapies sont nécessaires. Par exemple, les progrès limités en matière de détection précoce et de traitement du cancer du pancréas expliquent probablement pourquoi ce cancer est la troisième cause de décès par cancer au Canada, bien qu’il soit le onzième cancer le plus souvent diagnostiqué25. Actuellement, il n’existe aucun test de dépistage du cancer du pancréas et, en raison de la localisation rétropéritonéale de l’organe, plus de 60 % des cas sont diagnostiqués à un stade tardif26. Comme les options de détection et de traitement restent rares, des efforts plus importants sont nécessaires pour améliorer la prévention primaire, la détection précoce et le traitement du cancer du pancréas.
En revanche, la survie et la mortalité des cancers du poumon et des cancers hématologiques se sont considérablement améliorées depuis les années 1990, avec l’avènement des thérapies ciblées, des immunothérapies, des progrès de la radiothérapie et de la chirurgie, entre autres avancées technologiques dans la prise en charge de ces cancers avancés.
Limites de l’étude
Les conséquences potentielles liées à la COVID-19 sur l’incidence du cancer et la mortalité ne sont pas incluses dans nos projections. En raison de la complexité de l’enregistrement et de la vérification du cancer, on constate des retards considérables dans la collecte des données. Nous avons utilisé les données disponibles les plus récentes et complètes pour l’incidence (2018) et les décès (2019) pour toutes les analyses. Nous pensons que les mesures prises pour lutter contre la propagation de la COVID-19 ont eu des effets sur de nombreuses activités de lutte contre le cancer au Canada. Les interruptions des programmes de dépistage et des voies de diagnostic ont pu entraîner une réduction des diagnostics et faire passer certains cancers à des stades plus avancés27,28. Nous pensons que les cancers qui n’ont pas été diagnostiqués au départ pendant la pandémie le seront dans les mois et les années qui suivront, ce qui entraînera un équilibrage de l’incidence au fil du temps. Nous supposons que les cancers diagnostiqués à l’heure actuelle à des stades plus avancés et les éventuels retards de traitement liés à la pandémie auront un impact sur la mortalité et la survie.
L’absence de données d’incidence de la province de Québec après 2010 limite également notre étude. Pour surmonter cette difficulté, nous avons présumé que les tendances de l’incidence du cancer au Québec étaient similaires à celles observées dans le reste du Canada. Bien qu’il soit peu probable que cette hypothèse soit exacte pour tous les types de cancer, il était nécessaire d’avoir une certaine approximation pour estimer les statistiques nationales complètes sur le cancer. Des discussions sont en cours pour inclure et normaliser des données supplémentaires du Québec dans le Registre canadien du cancer par l’intermédiaire du Conseil canadien des registres du cancer.
Conclusion
Nos projections montrent l’effet considérable du cancer sur les personnes au Canada. Les réductions constantes des TINA et des TMNA soulignent les progrès significatifs réalisés dans la lutte contre le cancer grâce à la prévention, au dépistage, au diagnostic précoce et au traitement. Pour réduire davantage l’effet du cancer sur la population canadienne, il faut continuer à soutenir et à investir dans la recherche innovante et dans des politiques publiques efficaces et saines, et assurer une mise en œuvre dans tout le spectre de la lutte contre le cancer.
Footnotes
Intérêts concurrents: Ryan Woods déclare avoir reçu une subvention de recherche de la Fondation Michael Smith pour la recherche en santé, et un financement du Partenariat canadien contre le cancer. Donna Turner déclare recevoir un salaire en tant qu’employée d’Action cancer Manitoba, ainsi qu’un financement pour ses déplacements de la part de la Société canadienne du cancer. La Dre Turner est également membre bénévole du conseil d’administration de la Manitoba Tobacco Reduction Alliance. Aucun autre intérêt concurrent n’a été déclaré.
Cet article a fait l’objet d’un examen par les pairs.
Collaborateurs: Tous les auteurs ont contribué à la conception et au plan du travail, ainsi qu’à l’acquisition, l’analyse et l’interprétation des données. Tous les auteurs ont rédigé le document manuscrit, ont révisé d’un œil critique le contenu intellectuel important, ont donné leur approbation finale à la version à publier et ont accepté la responsabilité de tous les aspects de l’ouvrage.
Financement: Cette publication a été élaborée par le Comité consultatif des statistiques canadiennes sur le cancer, en collaboration avec la Société canadienne du cancer, Statistique Canada, et l’Agence de la santé publique du Canada a reçu un appui financier du secteur public et de donateurs. Aucune source de financement externe n’a été obtenue pour cette étude. L’Agence de la santé publique du Canada a financé la traduction de cet ouvrage en français.
Partage des données: Les données incluses dans ces analyses peuvent être obtenues par le public et les chercheurs s’ils présentent une demande et accèdent aux Centres de données de recherche de Statistique Canada.
Avis de non-responsabilité: Les constatations et conclusions exprimées dans ce rapport n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de la Société canadienne du cancer.
- Accepted March 3, 2022.
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