Un des problèmes majeurs de la vie contemporaine est celui du contrôle d'une puissance économique qui ignore les conséquences du progrès — Ralph Nader, Ces voitures qui tuent, 1967
Même si Ralph Nader visait l'industrie de l'automobile, son commentaire pourrait s'appliquer à l'industrie pharmaceutique d'aujourd'hui. De lourdes pressions poussent les sociétés pharmaceutiques à chercher à établir un équilibre entre les bénéfices et le bien-être des consommateurs. Comme il en coûte à peu près 600 millions de dollars US pour commercialiser un nouveau médicament, les fabricants doivent tirer le maximum de leur investissement.
Les sociétés pharmaceutiques financent directement ou indirectement la majeure partie de l'éducation continue des médecins en ce qui concerne l'utilisation des nouveaux médicaments. Elles retiennent les services de meneurs d'opinion à titre d'experts-conseils, lancent des publications comme des guides consensuels et envoient des «détaillants» dans les cabinets des médecins. Bien entendu, elles annoncent dans les journaux médicaux. Outre la publicité imprimée (que doit approuver un conseil de publicité), ces activités sont régies par un code de pratique d'application volontaire, passoire grossière qui peut exclure des incitations de la taille d'un bâton de golf, mais pas toujours des formes moins évidentes d'influence.
Le problème, c'est que partout où une société pharmaceutique exerce son droit commercial de présenter ses produits, l'intérêt personnel a la chance de faire son travail subtil. Ce qui peut se produire non seulement dans le texte d'une annonce, mais aussi dans des domaines réglementés comme les monographies de produit et les lettres «Madame, Monsieur, Docteur». Dans ce numéro, Catherine Lemière et ses collaborateurs1 (voir page 1008) présentent un compte rendu de la confusion qu'a causée l'approbation récente, par Santé Canada, d'une nouvelle indication pour l'Advair, aérosol combiné contre l'asthme. L'entreprise, GlaxoSmithKline, a commencé à utiliser l'expression (qui se contredit elle-même) «traitement d'entretien initiale» dans ses documents de commercialisation. Les médecins membres du Comité de l'asthme de la Société canadienne de thoracologie étaient d'avis qu'on pourrait mal interpréter cette expression et l'utiliser pour promouvoir l'Advair comme thérapie convenant aux patients atteints d'asthme léger d'apparition récente. Le guide en vigueur de la société n'appuie pas cette utilisation2. Ils ont manifesté leur opposition.
Cette lacune subtile et, nous dit-on, accidentelle de la formulation a d'importantes répercussions sur le soin des patients. Ce qui nous oblige à nous demander : Comment analyser d'assez près les affirmations des sociétés pharmaceutiques? Même si la publicité imprimée destinée aux médecins est réglementée au Canada, comment empêcher la promotion d'indications non mentionnées sur les étiquettes dans les activités d'EMC commanditées par une entreprise et dans les affirmations des vendeurs aux médecins?
Il y a plus d'un an, un jury du coroner a recommandé que Santé Canada oblige les sociétés pharmaceutiques à améliorer l'information sur les effets indésirables et les contre-indications de leurs produits. Un an plus tard, le plan de Santé Canada prévoyant qu'il faut «communiquer avec les parties intéressées» et évaluer la faisabilité de «l'affichage et la mise à jour électroniques des monographies de produit»3 semble une façon hésitante de prendre le taureau par les cornes.
Les patients ont besoin d'une description claire et impartiale de l'utilisation et des effets de leurs médicaments. Les médecins ont besoin des mêmes renseignements dans les documents produits à leur intention et non de la liste actuelle de dénis de responsabilité en petits caractères que contiennent les monographies de produit. — JAMC
References
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