Un homme de 85 ans ayant des antécédents d’adénocarcinome pulmonaire non à petites cellules récidivant a consulté à la clinique pour une cyanose et une nécrose douloureuses aux doigts depuis 2 semaines (figure 1), accompagnées d’une perte de poids, d’une toux sèche et de dyspnée. Il avait reçu un diagnostic de maladie de Raynaud (non strictement liée à l’exposition au froid) 5 ans plus tôt, et présentédes ulcères digitaux à répétition au cours des 2 dernières années. Il avait également subi une lobectomie pour son cancer du poumon 10 ans auparavant; une récidive a été diagnostiquée 2 mois avant sa consultation.
A) Cyanose de l’extrémité des doigts d’un homme de 85 ans, avec nécrose de l’index, du majeur, de l’annulaire et de l’auriculaire droits, et du pouce, de l’index, du majeur et de l’annulaire gauches. B) Coloration livide de la peau de la face dorsale des doigts, de l’index à l’auriculaire, et des articulations métacarpophalangiennes.
À l’examen physique, le patient présentait une cyanose et une nécrose des extrémités, et ses pouls ulnaires bilatéraux étaient non palpables. Il ne présentait aucun autre signe de maladie des tissus conjonctifs ou de vascularite. Les résultats des analyses de laboratoire étaient normaux (formule sanguine complète, vitesse de sédimentation, coagulation, analyse d’urine, et recherche d’anticorps antihépatite B et C, de cryoglobulines et de plusieurs autoanticorps), à l’exception d’une augmentation du taux de protéine C-réactive (99,1 mg/L [valeurs de référence : 0–5 mg/L]). L’échographie duplex couleur a révélé une occlusion bilatérale des artères ulnaires et palmaires; la capillaroscopie périunguéale était sans particularités. Nous avons diagnostiqué un syndrome paranéoplasique vasculaire touchant les extrémités et traité le patient de manière palliative au moyen d’iloprost 20 μg intraveineux pendant 10 jours et d’hydromorphone orale 1,3 mg au besoin. La nécrose s’est étendue aux pieds 2 semaines après la consultation, et le patient est décédé 1 mois plus tard (annexe 1, accessible en anglais au www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.200430/tab-related-content).
Le syndrome paranéoplasique vasculaire touchant les extrémités est une maladie vasculaire rare. Dans 50 % des cas, il est associé à un adénocarcinome, sans prédominance liée au sexe1,2. Il s’accompagne d’ischémie digitale, ce qui comprend la maladie de Raynaud, d’acrocyanose et de gangrène digitale1,3. Selon une revue rétrospective de 15 cas, l’intervalle médian entre le diagnostic de cancer et la nécrose des extrémités est de 2 mois (intervalle : 1–9 mois)2. La gangrène digitale semble commencer au même moment que le cancer ou plus tard, mais elle peut aussi le précéder. Plusieurs mécanismes ont été avancés, notamment l’envahissement tumoral du système nerveux sympathique, la microembolisation de fragments tumoraux, ainsi que l’hyperviscosité sanguine et la surproduction de médiateurs vasoconstrictifs, thrombogènes et immunologiques par les cellules tumorales1,4,5. La plupart des cas rentrent dans l’ordre lorsque la tumeur primitive est traitée. Les prostaglandines peuvent offrir un soulagement2.
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Remerciements
Les auteurs remercient le Dr Holger Flick pour sa collaboration à cet article.
Footnotes
Intérêts concurrents : Aucun déclaré.
Cet article a été révisé par des pairs.
Les auteurs ont obtenu le consentement du patient.
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