Une couche d’aspect villeux est apparue sur la langue d’un homme de 55 ans, après qu’il a passé 1 mois aux soins intensifs pour le syndrome de Guillain–Barré. Durant son séjour à l’hôpital, il avait été intubé pendant 11 jours et avait subi une trachéotomie. Outre la détresse causée par l’apparence de sa langue, il était préoccupé par la diminution de son sens du goût. Le patient ne s’est pas plaint d’autres maux. Il avait des antécédents de tabagisme de 30 paquets-année. Aux soins intensifs, il avait reçu la combinaison pipéracilline-tazobactam, la combinaison triméthoprime-sulfaméthoxazole, de la ciprofloxacine et de la quétiapine. L’équipe soignante a d’abord diagnostiqué une candidose buccale, pour laquelle elle a prescrit plusieurs traitements de nystatine orale et de fluconazole systémique. L’absence de réponse aux antifongiques ainsi que l’aspect clinique typique de la langue et les antécédents du patient nous ont amenés à diagnostiquer une langue villeuse (figure 1).
La langue villeuse est une affection bénigne résultant de l’allongement des papilles filiformes en raison d’une accumulation de kératine. Elle peut être due à une exfoliation inadéquate (notamment attribuable à une diminution de l’alimentation orale, à une mauvaise hygiène buccale ou à une sécheresse buccale liée à la prise de médicaments anticholinergiques) et à une accélération de la kératinisation (comme c’est parfois le cas en présence d’une irritation liée au tabagisme)1. La langue villeuse est caractérisée par la présence d’une couche d’aspect chevelu sur le dos de la langue, les côtés et l’extrémité n’étant pas touchés2. Cette couche peut être de couleur crème, brune ou noire, dépendamment des facteurs extrinsèques, comme le régime alimentaire et le tabagisme, et des facteurs intrinsèques, comme les bactéries chromogènes et les champignons1,3.
La langue villeuse est généralement asymptomatique. Bien que le diagnostic soit clinique, une biopsie de la langue est parfois nécessaire pour clarifier le diagnostic si la lésion ne répond pas à un traitement conservateur1. Comme ce fut le cas chez notre patient, la langue villeuse est souvent confondue avec une candidose pseudomembraneuse et traitée de manière inefficace avec un médicament antifongique3. Le traitement consiste principalement en un débridement avec une brosse à poils doux; le patient doit également être rassuré1. Les agents aggravants doivent être éliminés et les facteurs de risque, modifiés, dans la mesure du possible. Le plus souvent, la langue villeuse se résorbe spontanément.
Nous pensons que la langue villeuse de notre patient était due à une période prolongée d’alimentation orale limitée, à une xérostomie liée aux effets anticholinergiques de la quétiapine et à une modification de la flore buccale due à divers traitements antimicrobiens. La langue du patient s’est considérablement améliorée après 2 mois.
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Footnotes
Voir la version anglaise de l’article ici: www.cmaj.ca/lookup/doi/10.1503/cmaj.201559
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Les auteurs ont obtenu le consentement du patient.
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