La rencontre du spermatozoïde et de l'ovule au bon endroit, habituellement une trompe de Fallope, mais de plus en plus souvent dans une boÎte de Petri, a des répercussions sur les plans biologique, éthique et politique.
Sur le plan biologique, ce noyau de matières nucléiques commence à se multiplier pour former deux cellules, ensuite quatre, puis huit – jusqu'à ce que, 14 jours plus tard, cet embryon préimplantatoire (blastocyste) contienne de 100 à 140 cellules environ. Les cellules souches, population de cellules contenues dans le blastocyste, ont une capacité de réplication continue et, semble-t-il, indéfinie. Dans le bon environnement, elles peuvent se différencier en de nombreux types de cellules. Conjuguées à la facilité relative avec la-quelle il est possible de les identifier, de les extraire et de les cultiver, leur capacité proliférative illimitée rend les cellules souches embryonnaires des plus intéressantes pour les chercheurs à l'affût de nouveaux traitements contre le diabète, la maladie de Parkinson et d'autres problèmes.
Le contexte éthique du prélèvement de cellules souches chez les adultes est relativement simple et les lignes directrices des trois conseils couvrent déjà l'utilisation des tissus de fœtus en recherche1. Le prélèvement de cellules souches d'embryons vivants constitue toutefois une innovation récente que n'avaient pas prévue les lignes directrices en question. Le prélèvement des cellules entraÎne la destruction de l'embryon, ce qui pousse les chercheurs dans un domaine contesté de l'éthique. Certains croient que le blastocyste de 14 jours n'a pas d'individualité inhérente2. D'autres ne sont pas d'accord et croient que ces embryons ont un droit moral sur la société et qu'il faut les protéger3.
Les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) se sont lancés sur ce terrain épineux pour diffuser des politiques et des règles nouvelles sur la recherche financée par le gouvernement fédéral et au cours de laquelle on utilise des cellules souches humaines4 (voir page 1077). La nouvelle politique permet de prélever des cellules souches d'embryons «de réserve» créés par fécondation in vitro, interdit certaines recherches comme le clonage humain, crée un registre de toutes les cultures de cellules souches et les met à la disposition de tous les chercheurs, et interdit le paiement des embryons ou des cellules souches donnés. Reconnaissant que le cadre éthique est plutôt sommaire dans ce domaine, les IRSC ont créé un Comité national d'évaluation de la recherche sur les cellules souches, qu'ils ont chargé d'étudier la conformité à l'éthique de toutes les recherches subventionnées par les IRSC et portant sur les cellules souches humaines.
Ces politiques sont à la fois opportunes et raisonnables. Que dire toutefois des recherches sur les cellules souches financées par le secteur privé? Les lignes directrices des IRSC ne les réglementent pas. La recherche biomédicale dite «Nasdaq» se propage comme la salicaire pourpre dans les marais de l'Ontario. Nous avons besoin d'une mesure législative fédérale qui régira toutes les recherches sur les cellules souches effectuées au Canada. Ni les milieux scientifiques ni le public ne devraient se satisfaire d'un double étalon qui laisse les recherches subventionnées par le secteur privé échapper en fait à l'examen éthique et aux mesures de protection réglementaires. Le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes a étudié un avant-projet de mesure législative. Beaucoup de pays d'Europe et d'ailleurs ont adopté des lois5. Nous devons le faire nous aussi. — JAMC